Aujourd’hui l’intervention de Henriette, au nom de la Coordination des sans-papiers de la Belgique dans l’action Kick Off In my Name.
« Vingt et une années ont passé depuis la proclamation de cette journée que nous célébrons aujourd’hui. Pourtant, en Belgique et partout en Europe, les collectifs de personnes migrantes (notamment les sans-papiers) en sont encore à revendiquer le respect de leurs droits les plus fondamentaux. Nous en sommes encore à lutter pour infirmer les représentations caricaturales de nos personnes imprimées avec succès dans l’imaginaire populaire par les machines politique et médiatique. Le migrant est devenu depuis le temps de la chair à canon pour les partis nationalistes si bien caractérisés par leur vision xénophobe de la migration.
Une migration tant décriée mais pourtant essence de l’essor économique et industriel du continent européen, la Belgique incluse. Migration, juste contrepartie d’une première vague de migration, initiée par l’Europe vers nos contrées d’origine officiellement sous couvert d’exploration, d’ouverture culturelle, d’apport ou de maintien de la paix; des preuves factuelles font état cependant, de maintes et longues ingérences politiques et économiques de l’Europe dans ces pays.
Les migrants paient en somme, le lourd tribut des nombreuses disruptions économiques, sociales et politiques provoquées par les invasions coloniales et belliqueuses de l’Europe dans leurs pays d’origine y rendant en conséquence, incertain et trouble tout avenir, toute forme de paix et de sécurité.
De son côté, la politique migratoire belge s’entête à s’enfermer dans l’inhumanité au travers d’un pouvoir désicisionnel arbitraire, bancal et discriminant maintenant les personnes sans-papiers captives des jougs de l’exploitation, de la violence, de l’invisibilité et du silence.
Loin de vous imposer une analyse sémantique, je tiens à rappeler, à mettre en lumière ceci: la personne sans-papiers reste encore à l’heure actuelle, en Belgique, une chose dénuée de valeur humaine, intellectuelle, culturelle ou professionnelle, une chose dénuée d’identité, ce dans tous les sens existants du terme.
Pas plus tard que cette semaine, un jeune homme tout juste sorti de l’enfance a trouvé la mort dans de sombres circonstances dans un commissariat bruxellois. Invisible et invisibilisé durant son séjour en Belgique de son vivant, c’est en invisible et en invisibilisé que ce jeune homme nous a quittés: la preuve étant le silence autour de son identité juridique.
C’est le troisième décès du genre cette année, après Ibrahima Barrie et Ilyes Abbedou. Ces noms ne sont que le peloton de tête de la longue liste des victimes de l’invisibilisation quotidienne de la personne sans-papiers forcée par la criminalisation de ce statut.
Cependant, nous ne faillirons jamais à mettre une voix, nos voix sur cette voix qui s’est tue cette semaine mais aussi sur toutes les voix qui se sont tues depuis le temps. Puisse-t-il reposer en paix et en puissance!
Mes cher.e.s, l’heure n’est plus à l’affliction. L’heure n’est plus à la parole vaine. L’heure n’est plus au marchandage.
L’heure est à l’auto-octroi. Lheure est à l’auto-représentation par notre occupation des espaces physique et médiatique.
L’heure est à l’action. COMMUNE!
À l’action commune des collectifs de personnes sans-papiers unifiés et de chacun.e des citoyens belges.
Parce que les affamé.e.s que nous sommes n’en peuvent plus d’attendre ni l’invitation à dîner ni le repas qui traînent à nous parvenir. Parce que nous croyons fermement que la victoire pour toutes les personnes sans-papiers réside dans l’unité, nous vous invitons à prendre avec nous le train de la campagne In My Name et à occuper, en nos noms, les espaces décisionnels en vue d’une modification radicale de la loi du 15 décembre 1980.
Sachez que toute voix, tout soutien, tout apport, aussi minime puisse-t-il vous paraître, est chargé.e d’une portée politique considérable.
Soyez donc, avec nous, acteurs de ce changement plus que nécessaire. »
La Coordination des sans-papiers de Belgique.
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